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Mais où est donc passé le courage managérial ?
21 novembre 2023| Valérie Spitzer
Toutes les entreprises ont besoin de bons managers. Mais, pas tous les gestionnaires ont le courage de prendre de bonnes décisions en périodes de crise.
Le courage managérial, c’est quoi ? On peut le définir comme étant « le niveau de détermination d’un gestionnaire à prendre les directions et les orientations nécessaires même lorsqu’elles pourraient causer de l’insatisfaction ou une certaine désapprobation de la part de ses interlocuteurs ».
Alors, concrètement, faire preuve de courage managérial, facile ou pas facile ?
Pour ma part, jeune diplômée, j’avais une vision assez simpliste et « rose bonbon » des chefs d’entreprise ! Tel « Zorro », ils me semblaient forts, quasi-invincibles. S’ils avaient été capables de créer et développer une entreprise, ils devaient forcément avoir le courage de leurs opinions et notamment la capacité à confronter leurs employés en cas de litige, non ?
25 ans plus tard, et autant d’années d’expérience en ressources humaines dont dix comme chasseur de tête, il m’est bien obligé de réviser mon point de vue. Bien sûr, il y en a toujours qui forceront mon admiration. Très récemment encore, nous discutions d’un chef d’entreprise qui se bat bec et ongle pour sauver son entreprise et donc tous les employés qui comptent sur lui pour subvenir à leurs besoins. Il a été capable de licencier les incompétents, même en période de pénurie de main-d’œuvre pour recréer une équipe dynamique, des employés qui ont envie de donner leur 100% afin de remonter l’entreprise, assez durement touchée par la pandémie.
Toutefois, le courage managérial semble faire défaut à plusieurs. Une employée, qui travaille dans un ministère, a connaissance d’une situation problématique, impliquant plusieurs employés incompétents. En toute bonne foi, elle transmet les informations nécessaires à son gestionnaire afin qu’il puisse intervenir. Surprise de l’intéressée : On lui fait clairement comprendre qu’on n’interviendra pas. Le modus operandi : Ne pas faire de vagues ! Courage de l’employée certes, qui a le courage de dénoncer une situation inacceptable. Courage managérial du gestionnaire ? Hum, moins sûre !
Le confort inconnu ou l’inconfort connu.
Les gestionnaires sont avant tout des humains ! Et, tout humain, à divers degrés, vit une certaine réticence face au changement. Il semblerait que pour certains, le degré soit plus élevé ! Il est souvent plus facile de se complaire dans un inconfort connu que de se lancer dans l’inconnu et de prendre des décisions parfois difficiles… Et pourtant, l’inaction ne devrait jamais être une option, comme l’explique très bien la journaliste Geneviève Desmarais, dans le journal les Affaires.
Un employé de longue date incompétent
Il y a bien sûr des situations délicates, où le courage managérial est plus que jamais nécessaire. Prenons le cas d’un employé qui travaille pour une organisation depuis une dizaine d’années. Avec le temps, il est devenu plus laxiste dans son travail et prend celui-ci pour acquis. Résultat : Il ne correspond clairement plus aux attentes de son employeur. Mais celui-ci tergiverse et a du mal à se décider. Toutes les raisons sont bonnes pour ne pas passer à l’action. « Il fait partie des meubles », « Comment ses collègues vont réagir si je le licencie », « Il possède la mémoire corporative de l’entreprise ».
Il va sans dire qu’une situation à problème ne va pas s’arranger d’elle-même et risque même de s’envenimer. Le patron devra alors faire preuve de courage managérial, confronter l’employé, seul à seul bien sûr. Si la situation ne s’arrange pas, le licenciement devra être envisagé. Plus facile à dire qu’à faire visiblement car, au quotidien, nous rencontrons des entrepreneurs qui ont bien du mal à aller au bout de leurs démarches. À plusieurs reprises, nous avons vécu le cas où l’employeur entamait une démarche de recrutement pour remplacer l’employé à problème mais n’allait pas jusqu’au bout. Mais où est donc passé le courage managérial ?
Ah, la famille !
Eh oui, la situation que personne ne veut vivre mais qui arrive régulièrement. En tant que chasseur de tête, on nous a demandé à plusieurs reprises, de remplacer un membre de la famille, qui fait partie de l’organisation. La femme du patron, le fils de l’employeur, le cousin du gestionnaire principal. Bref, vous voyez l’idée, problème à l’horizon ! Bien évidemment, le courage managérial est encore plus de mise que pour un employé « lambda ». Pas facile de passer à l’action quand les émotions s’en mêlent. Encore une fois, certains employeurs sont capables de faire preuve de courage managérial alors que d’autres renoncent. Il sera essentiel, dans ce cas bien précis, de rester impartial et si l’employé, quelque soit son statut envers l’employeur, ne donne plus satisfaction, d’agir en conséquence et de savoir faire une coupure claire entre l’affectif et le travail.
Un recrutement qui n’en finit plus
Comme chasseurs de tête, vous imaginez bien que nous sommes confrontés à des situations de recrutement très diversifiées selon nos clients. On parle souvent des candidats qui hésitent à changer d’emploi ou bien changent d’idée, même lorsque le processus de recrutement est bien entamé. Mais qu’en est -il des employeurs ? Certains chefs d’entreprise rencontrent un candidat, ont un coup de cœur et sont capable de se décider rondement. La situation idéale, quoi ! Pour d’autres, c’est plus compliqué. S’ils pouvaient, je crois bien qu’ils verraient le candidat en entrevues de recrutement une bonne dizaine de fois avant de se décider… Ou non. J’exagère ? À peine ! Notre rôle, comme recruteur, est de leur rappeler encore une fois l’importance du courage managérial.
Tout recrutement comporte sa part de risque et en tant qu’entrepreneur, vous devez être capable de gérer les zones grises et les risques. Impossible de prendre une décision en ayant 100% des informations et 100% de certitude. Allez, courage !
Je terminerai sur les sages paroles de Nelson Mandela, dans son livre, « Un long chemin vers la liberté » : Le courage, ce n’est pas l’absence de peur, mais la capacité de la vaincre.